Lycée E3D

Le lien à la nature : un besoin essentiel pour notre jeunesse promu par le John Muir Trust. Des élèves à la rencontre de l'association écossaise.

Par DOMINIQUE MARABESE, publié le samedi 3 juillet 2021 18:18 - Mis à jour le mardi 6 juillet 2021 10:39
Last Child in the Woods.jpg
Après s'être informés sur les troubles liés au manque de nature grâce à des documents en anglais, les élèves ont enquêté par visioconférence sur le John Muir Award, outil pédagogique utilisé en GB pour favoriser le contact avec la nature.

La découverte de la notion de nature-deficit disorder

Cette recherche a concerné un groupe de treize élèves de 1ère en section européenne.
En avril dernier, les élèves ont commencé la démarche par une phase de découverte de la notion de Nature-Deficit Disorder, expression désignant les troubles liés au manque de nature introduite en 2005 par l’auteur américain Richard Louv dans son ouvrage devenu un bestseller aux Etats-Unis Last Child in the Woods.

Pour se familiariser avec la notion, les élèves ont lu et commenté un article du site internet de la BBC datant de 2016 intitulé « All you need to know about nature-deficit disorder »
Ils ont pu ainsi appréhender les problématiques soulevées. Le mode de vie de la plupart des sociétés actuelles est de plus en plus sédentaire et le temps passé devant les écrans réduit considérablement le temps où nous sommes en contact avec la nature. De nombreuses études exposées dans le livre de Richard Louv montrent une corrélation entre ce phénomène et des troubles constatés de façon croissante, particulièrement chez les enfants. Troubles de l’attention, hyperactivité, nervosité, sentiment d’isolement, déprime, obésité sont de plus en plus fréquents.
L'étude de ce document a donné matière à beaucoup d'échanges entre les élèves en anglais, partageant parfois leurs ressentis sur la question.


Les bienfaits du lien avec la nature

Les élèves ont ensuite analysé la première de couverture de l’ouvrage qui est une invitation à donner urgemment une place beaucoup plus importante au contact avec la nature dans nos vies, et particulièrement dans celles de nos enfants. Ils ont ensuite écouté une intervention de son auteur qui dénonce le manque de contact à la nature dans l'éducation des enfants aux Etats-Unis, la réduction de l'enseignement de l'EPS et des récréations plus courtes.Loin de s’en tenir à des constats préoccupants dans son ouvrage, l'auteur propose des solutions pour retrouver ce contact et fait l’inventaire de tous ses bienfaits pour les enfants :
stimulation de tous les sens, contact direct avec la vie, sentiment de trouver sa place au contact des éléments, des animaux et des plantes, sentiment de liberté et d’espace, dépense physique et bien-être, espace de découverte et de jeu informel qui peut être source d’apprentissage, créativité décuplée, émerveillement,  …
Dans l’interview, Richard Louv cite les nombreux exemples qui lui ont été rapportés d’enfants turbulents en classe qui deviennent des leaders très concentrés dans les activités dans la nature. Il évoque aussi les bienfaits pour les personnes atteintes d’autisme.
Après des activités dans la nature, les enfants sont plus concentrés, pensent plus clairement et sont animés d’émotions positives.

Richard Louv était invité à la conférence Europarc en Ecosse en Septembre 2018 qui mettait en avant l'implication des jeunes dans les espaces protégés.
Il approuve totalement le dispositif mis en place par le John Muir Trust pour favoriser les activités dans la nature.

Après ces recherches, les élèves ont fait un travail de compréhension orale en répondant à des questions sur une vidéo en anglais faisant connaître l'association et introduisant le John Muir Award.
Ils ont ensuite écrit des questions qu'ils souhaitaient poser afin de préparer la visioconférence avec Emily, une personne du John Muir Trust, contactée pour donner des précisions sur le dispositif. Douze questions lui ont été envoyées avant la rencontre. Après son premier exposé apportant les réponses à ces questions, les élèves ont pu poser quelques questions supplémentaires.



Compte-rendu de l’entretien avec le John Muir Trust au sujet du John Muir Award

En plus de son travail de sauvegarde d’espaces sauvages en Grande-Bretagne, l’une des missions du John Muir Trust, créé en 1983, est de favoriser l’implication de tous dans ce processus en donnant l’occasion de faire des activités concrètes permettant de mieux connaître la nature, de la protéger et de ressentir ses bienfaits afin d'ancrer en chacun la nécessité de cette sauvegarde.
Le John Muir Award a été créé par l’association écossaise à cet effet en 1997. C’est un certificat qui valorise une démarche en quatre étapes : découvrir un lieu, l’explorer, faire des actions pour en prendre soin et communiquer sur l’expérience vécue. (images en pièce jointe)


 Emily, notre interlocutrice, travaille pour l'association depuis un an et demi mais ses partenaires de travail ont plus de dix ans d'ancienneté. L’entretien s’est bien sûr déroulé en anglais (questions et compte-rendu complet en anglais en pièce jointe). Voici les principales informations récoltées.

Lieux et activités choisis:

Le John Muir Award est un dispositif utilisé en Ecosse, en Angleterre et au Pays de Galles.
Les lieux choisis sont variés : espaces protégés, parcs urbains, espaces verts dans les écoles, …
Les activités sont également très variées, du nettoyage du plus grand sommet d’Ecosse jusqu’à l’exploration d’une forêt et la plantation d’arbres. Cela peut être plus simple aussi.
 Tout dépend des moyens dont disposent les participants et de l’objectif choisi.

Différents degrés d’engagement
Discovery Award : 4 jours
Explorer Award : 8 jours
Conserver Award : 20 jours

Nombre de John Muir Awards délivrés depuis 1997
430 000

Age des participants

10% ont entre 8 et 10 ans
45% ont entre 10 et 11 ans
35% ont entre 12 et 16 ans
5% ont entre 17 et 24 ans
5% ont plus de 25 ans

Diversité des participants

90% des participants sont en âge scolaire. Le dispositif est très utilisé dans les établissements scolaires de Grande-Bretagne. En Ecosse, il fait partie du Curriculum for Excellence.

Cependant, il n’y a pas de limite d’âge et les participants sont très divers: personnes âgées de maisons de retraite, personnes en situation de handicap, personnes souffrant d’addictions, personnes résidant en GB mais sont l’anglais n’est pas la langue maternelle, …
Les actions du John Muir Award peuvent maintenant être relatées en gaëlique, ce qui attire des candidatures de personnes soucieuses de perpétuer aussi la mémoire culturelle des lieux.

Les candidatures peuvent être individuelles ou en groupe.

Bénéfices pour les participants

Ils sont toujours ravis de leurs expériences. Ils se sentent libres et paisibles pendant ces activités à l’extérieur. Heureux de faire des choses par eux-mêmes tout en faisant partie d’une aventure collective.
Ils explorent le lieu de diverses manières, à divers moments et le voient sous un autre angle. Ils ont parfois l’occasion de faire des activités qu’ils ne connaissaient pas pour la première fois et souhaitent les poursuivre.
Après l’expérience, ils ressentent un lien fort avec le lieu dans lequel ils ont travaillé.

Impact du John Muir Award sur la vie future des participants

Il y a probablement des découvertes de vocations mais rien n'a été quantifié pour l'instant.
 Une étude sur l’impact du dispositif est actuellement menée par l’Université de Glasgow qui permettra d'en savoir plus sur la question.

Adaptation pendant la pandémie

Les leaders du John Muir Award ont créé des vidéos pour guider les gens dans des pratiques d’activités à la maison. Certains jeunes ont fait des activités de nature en famille et ont partagé leurs expériences via Skype, Zoom ou Teams.
Ces activités ont permis aux jeunes de rester actifs pendant les confinements et de garder un bon moral au contact de la nature. Partager leurs expériences leur a permis de rester en lien entre eux aussi.
Des actions ont également été menées dans les parcs écossais.

Le John Muir Award le plus original

D'après Emily et son équipe, il s'agit de la candidature d'un employé d'un parc national. Il s'est déguisé en John Muir et a passé plusieurs jours dans le parc pour faire les activités prévues avec l'équipement utilisé au 19 ème siècle. Il est parti en compagnie de ses chiens, clin d'oeil supplémentaire à John Muir qui était souvent accompagné de son chien Stickeen dans ses aventures!

La nature comme soignant

Emily nous a confié qu’elle travaillait précédemment dans une structure accueillant des personnes souffrant de troubles mentaux.
Elle a candidaté à ce poste qu’offrait le John Muir Trust pour travailler dans le domaine de l'environnement mais aussi pour avoir un impact plus direct sur ces troubles. Elle constate que le contact avec la nature a un effet réellement bénéfique sur ces personnes et, de manière générale, sur tous les participants.
Elle est très heureuse d’occuper ce poste et pense que les activités proposées par le John Muir Trust sont très positives, tant pour la sauvegarde des espaces sauvages que pour la santé morale et physique des personnes.

Emily a ensuite posé des questions aux élèves, leur demandant des renseignements sur les lieux à visiter dans les Pyrénées et sur les activités qu'ils pratiquent dans la nature. Certains ont beaucoup apprécié cette possibilité d'échanges directs. La sortie dans la réserve naturelle du Pibeste a été un peu évoquée (six élèves y avaient participé l'année dernière)

L'ensemble de ces recherches a permis aux élèves d'appréhender l'importance du contact avec la nature pour la santé morale et physique de tous. Leurs compte-rendus et commentaires des documents proposés et leur participation active dans les discussions qui ont suivi en classe ont permis de mesurer l'intérêt que suscitent ces questions. S'informer sur des recherches menées et des solutions mises au point à l'étranger permet de mettre en perspective le sujet et d'expliquer une volonté de démarches communes par-delà les frontières. Voilà une raison supplémentaire de rester en lien avec le John Muir Trust, évoquée dans la troisième partie du projet complet exposé lors des journées académiques de l'innovation pédagogique le 29 avril dernier.

  L'enquête consignée ici met en avant l'urgente nécessité de restaurer le lien avec la nature dont nous faisons partie pour vivre pleinement, en harmonie avec elle, mais aussi pour s'engager avec motivation et sans attendre dans des actions respectueuses de l'environnement afin de préserver toutes ces richesses naturelles dont notre vie dépend.

 

 

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